Critique littéraire #3 : Des cons et consorts

Le blog lavierennaise collabore avec les éditions Rue Nantaise, rennaises bien évidemment, pour écrire des critiques littéraires sur leurs livres. Ceci est la troisième critique littéraire avec le livre Des cons et consorts d’Emmanuel Glais. Un livre qui confronte les critiques littéraires à leurs raccourcis trop rapides. Ce n’est pas LE livre de l’année, c’est un premier livre qui vaut ce qu’il vaut mais qui montre une véritable culture littéraire de la part de l’auteur, un goût prononcé pour l’ironie et une réflexion intéressante sur la condition du livre en France.

Le livre Des cons et consorts écrit par Emmanuel Glais, en 2011, a tout pour plaire aux étudiants, dont je fais partie. En effet, ce livre zoome sur la vie de Jonathan, pendant trois ans, de 2012 à 2015. De dix-huit à vingt-et-un an, le lecteur suit la vie de ce jeune homme, tout jeune lauréat du baccalauréat jusqu’à la fin de sa licence d’Histoire à l’université Rennes 2 Haute Bretagne.

Le début du livre commence par un Jonathan qui doute sur sa vie amoureuse. A dix-huit ans, rien d’anormal. Sabine, sa petite amie, l’a trompé et il l’a su par des amis quelques temps après. Prostitution, pornographie, adultère, Glais appelle un chat un chat et, un peu à la manière de Beigbeder, Lolita Pille et Virginie Despentes, écrit des phrases claires, nettes voire dures dans leurs propos. Sa famille est inexistante dans le livre. Il éprouve une profonde indifférence à l’égard d’un peu tout excepté sa sexualité, la littérature et l’Histoire.

« (…) on ne peut pas dire qu’il se passait grand-chose dans la vie de notre protagoniste. », écrit Emmanuel Glais. En effet, un peu comme tout le monde, il ne se passe pas grand-chose dans la vie de Jonathan. Il n’a pas ou peu d’amis. Les seuls qui le considèrent comme tels, il n’en a que faire.

Le défaut, dans ce livre, c’est qu’on ne sait pas où l’auteur veut en venir. S’enchaîne voyage en Tunisie, dépression, Houellebecq, politique, second mandat de Nicolas Sarkozy, filles et sexualité, sans vraiment de cohérence. Comme si on avait l’impression que l’auteur s’était dit « Tiens, je vais lui faire faire ça aujourd’hui. »  Morose, antipathique, désenchanté, Jonathan n’est pas l’ami qu’on souhaiterait avoir.

Une fin, il n’y en a pas vraiment. Elle tombe comme un cheveu sur la soupe. D’ailleurs, dans le livre, le narrateur ou l’auteur, on ne le sait pas, fait des apartés et l’écrit lui-même : « Cependant, une question se pose : comment termine-t-on ? » En tout, il y a trois interventions de ce narrateur omniscient. Est-ce l’auteur ? Est-ce quelqu’un d’autre ? Ce sont des remarques sarcastiques mais qui font rire : « Prétexte pour vous prendre du temps, et pour vous dire à vous-même « J’ai lu un livre » ».  En effet, j’ai lu un livre. Et la seule chose qui m’a touché à propos de Jonathan, c’est toute sa réflexion, à des moments un peu culpabilisante, sur les Sans Domicile Fixe (SDF).

Pour pouvoir critiquer ce livre de façon argumentée, j’ai été voir la biographie de l’auteur Emmanuel Glais. Vingt-et-un an, licencié d’Histoire, écrivain et journaliste à ses heures, Emmanuel Glais se veut sans prétention. Les éléments similaires entre lui et son personnage principal sont troublants. Emmanuel Glais et son premier livre confronte les critiques littéraires à leurs raccourcis trop rapides. Non, ceci n’est pas une autobiographie transposée dans le personnage de Jonathan. Glais confie même dans une interview : « Je ne me cache pas derrière un personnage de fiction. », « [Jonathan], c’était plus celui que je détesterais être. »

Deuxième chose qu’un critique littéraire a tendance à vouloir faire, trouver un sens, un intérêt au livre qu’il lit. A la fin du livre, je me suis dit « D’accord, mais quel est l’intérêt ? ». Au final, aucun. Le livre est né à partir d’une nouvelle à laquelle Emmanuel Glais n’arrivait pas à donner de fin. Il n’a pas su en trouver une pour le livre mais, tant pis. Au moins, il le reconnaît. Le plus intéressant, pour moi, a été les réflexions écrites en italique de cet auteur/narrateur, celles de la prostitution, de l’indifférence des personnes les unes entre les autres et de cette « souffrance collective » que subit l’Humanité. J’ai beaucoup aimé la mise en relation de Jonathan et Sabine avec la citation du livre Les Souffrances du Jeune Werther de Goethe, qui présente la deuxième partie du livre.

Au final, le livre n’a un intérêt que si on ne lui en trouve un. Portrait d’une société pleine de désillusions pour les uns, livre qu’on lit rapidement et qu’on oublie facilement pour les autres, en tout cas, Des cons et consorts a eu un intérêt pour moi, critique littéraire. Celui de ne pas tomber dans les raccourcis trop rapides de l’autofiction et du portrait désenchanté du vingt-et-unième siècle.


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