Les Champs Libres fait « résonner le chant des langues » jusqu’en juin

Babel sans peine, premier cycle des Champs Libres de l’année 2013, joue avec les langues pendant six mois, et ce à partir d’aujourd’hui, mardi 15 janvier. A travers conférences, expositions et rencontres, la bibliothèque des Champs Libres, le musée de Bretagne et l’Espace des sciences mettent en lumière des langues peu connues, apportent un éclairage sur les langues originelles bretonnes, les langues mondiales et la richesse de chaque culture. Présentation.

80 langues différentes sont parlées à Rennes, chaque jour. Ce chiffre étonne mais la ville mère de trois langues, le breton, le gallo et le français, abrite de nombreuses nationalités. Riches et variées, les langues ne cessent de fasciner et sont désormais montrées comme un atout pour les jeunes : être polyglotte est vivement conseillé. Le succès du programme d’échanges Erasmus en témoigne : 269 étudiants rennais sont partis en 2012 pour l’université Rennes 2, 350 pour Rennes 1.

Clin d’oeil au rennais Alphonse Chérel, père de la méthode Assimil

Jacqueline le Nail, directrice de la bibliothèque des Champs Libres, a choisi cette année les langues pour le cycle du premier semestre 2013. « Depuis dix ans, Rennes est devenue une ville où on parle beaucoup de langues, constate-t-elle. C’est une richesse fondamentale. » Une richesse qui se doit d’être exposé. Dix ans seulement mais en vérité, cela fait 84 ans que Rennes s’intéresse aux langues. En effet, Alphonse Chérel, fondateur de la méthode Assimil dont le premier volume s’intitule L’anglais sans peine, est né dans la capitale bretonne, « près des Champs Libres car il est né à proximité du champ de Mars (ndlr : renommée esplanade Charles de Gaulle) », rajoute-t-elle.

Le mercredi 13 février, une conférence donnée par son petit-fil Yannick Chérel et Patrick Souadet, directeur commercial de cette méthode réputée, retracera la vie d’Alphonse Chérel. Babel sans peine est aussi l’occasion de parler de la Bretagne, sa langue et son histoire avec Le breton sans peine, le 27 février orchestrée par la bibliothécaire des Champs Libres, Jacqueline Le Nail, Les langues de Bretagne le 5 février et une performance musicale Wezen où se mêleront allemand, elfique, gaélique accompagnées de mélodies de harpe.

Babel sans peine : « Pas une grande exposition mais une ambiance »

« Babel sans peine n’est pas une grande exposition mais plutôt une ambiance », présente Jacqueline. Ce chant des langues, il est possible de l’entendre dans les ascenseurs de la bibliothèque à partir d’enregistrements audio d’une trentaine de langues. Si vous ne prenez pas les élévateurs, vous remarquerez sans aucun doute au milieu des escaliers une grande tour de Babel, tour mythologique à l’origine de la multitude de langues, appelée Koua Kess et confectionnée par des étudiants de Lisaa (voir la rubrique sur Lisaa Rennes) qui représente des mots européens écrits phonétiquement.

Il n’y a pas que dans les ascenseurs que les mélodies résonneront. Une conversation musicale en italien avec Lucilla Galeazzi, interprète de Bella ciao, est proposée le 12 mars au Pôle musiques (niveau 2) de la bibliothèque. Julien Jacob, lui, a crée sa propre langue qu’il chantera le 24 avril prochain, dans la salle de conférences Hubert Curien. Le public rennais pourra aussi découvrir des contes russes, ukrainiens et polonais ou encore des langues traditionnelles de l’Europe de l’Ouest. Babel sans peine, c’est aussi le moment pour se poser des questions sur nos origines mondiales (Ces langues qui ont fait l’Europe, par Henriette Walter, le 17 avril) et son avenir (Les langues à vocation mondiale, le 23 janvier par Claude Hagège « défenseur des langues »). Et pour les étudiants qui le souhaitent, le Centre international rennais d’études de français pour étrangers (Cirefe) propose un café Tous polyglottes !, le 18 avril, pour échanger avec des étudiants étrangers.

La langue en tant que système

Ce cycle de rencontres ne traite pas seulement de la langue en tant que moyen de communication mais aussi en tant que système, ayant une linguistique propre à chacune. Les Champs Libres ont donc souhaité parler de langues mises à part : la langue des signes et des autistes. Le 29 janvier, Annie Mako, directrice de la Bête à Bon Dieu Production (BàBDP), animera un débat sur la citoyenneté et la place des personnes sourdes en société. « [La langue des signes] n’est pas suffisamment reconnue en tant que tel par l’opinion publique », explique-t-elle. Cette dernière a aussi mis en place depuis 2009 une collecte de témoignages de personnes sourdes ou entendantes, dont résulte une première vidéo qui sera projetée du 29 janvier au 10 mars sur la mezzanine des Champs Libres. Les psychanalystes sont nombreux à parler de la « voix de l’autiste » dont le Rennais Jean-Claude Maleval avec son livre L’autiste et sa voix. Ivan Ruiz Acero, cinéaste espagnol, aussi. Son film Autres voix, un autre regard sur l’autisme est diffusé le 20 janvier, en sa présence, suivi d’un débat, dans la salle Hubert Curien.

A découvrir aussi : les hiéroglyphes et la singularité de la voix. Le 26 mars, David Le Breton, anthropologue et sociologue, traite de la formulation de la voix, ses vibrations, son grain dans la conférence, Eclats de voix, une anthropologie des voix. Et comme Babel sans peine s’immisce pendant six mois dans la programmation culturelle rennaise, le festival des arts de la parole Mythos s’empare de l’occasion le 3 février dans le cadre des Premiers dimanches et d’une conférence, le 17 avril pour deux rendez-vous surprise.

 

Le trio vocal Izvan inaugure ce temps fort ce mardi 15 janvier, à 19 heures, dans le hall des Champs Libres.

Plus d’infos sur la programmation : ici

Dans sa dernière exposition, l’artiste Tr.Kaos malmène l’argent

En octobre 2011, le blog lavierennaise a rencontré l’artiste franco-autrichienne et ancienne psychologue dans le centre psychiatrique Guillaume Régnier de Rennes, Tr.Kaos lors du vernissage de son exposition, Machine à fabriquer des fous ?. Personne révoltée et surtout passionnée, sa rencontre avait été marquante et éclairante sur le sujet de l’Art et sa relation avec la maladie mentale.

L’aliénation humaine, Tr.Kaos alias Traudi, gravite toujours autour de ce sujet. En 2011, la folie et cette année, l’argent. Les dollars et les pièces de monnaie sont omniprésents dans cette exposition. Provocante et dérangeante, comme à chaque fois, le thème et le travail de l’artiste ne laissent pas indifférent. La galerie de l’Orangerie du Thabor accueille ses travaux, qui seront peut-être les derniers exposés en France, jusqu’au dimanche 25 novembre.

 

Photographies de femmes et de poupées entourées de dollars au thème gothique, le message de cette troisième exposition de Tr.Kaos, artiste française d’origine autrichienne, est on ne peut plus clair. L’argent est, selon elle, partout : sur les vêtements, dans les bouches et dans les abysses ou encore sur la croix de Jésus. « Je fais des expositions par révolte. Dans mes expositions, je traite toujours de quelque chose qui me préoccupe, » pose l’artiste et ancienne psychologue dans les centres psychiatriques. « Le monde contemporain ne fonctionne que par l’argent. Cela m’écœure. » « L’argent, c’est très dur d’en parler, » continue sa fille, Yuna Blum. « Cela peut facilement tomber dans le cliché car des centaines de choses existent sur l’argent. C’est même à la mode en ce moment. Dans les magasins, beaucoup de gadgets représentent des dollars. »

« J’aime l’art contemporain et [cet art] est très cruel »

« C’est l’une des expositions de Tr.Kaos qui est la plus explicite. Il n’y a pas besoin d’explications sur ce que l’on voit, contrairement à la précédente, Machine à fabriquer des fous ?, » explique Yuna. Ces motifs interrogent, mettent à mal notre moyen de paiement principal, l’argent. Pour traiter d’un tel sujet, l’artiste a voulu montrer les choses de façon cru : « Je n’aime que l’art contemporain. Et il est très cruel. Il y a du sexe, du sang et de la violence. C’est comme ça qu’est notre société actuelle. » Sur les deux pans de mur blanc amovibles sont mises en scène des personnes qui jouent avec des dollars jonchés sur le sol. Cette performance artistique a été faite dans le cadre de cette exposition. Tr.Kaos l’explique : « J’aime les performances, il faut jouer dans l’Art. »

Anciennement peintre qui considère que la peinture est du « journalisme noble », elle change désormais de cap et se met à la photographie. « J’ai de moins en moins envie de peindre. Désormais, il existe les vidéos et les photos qui sont un recommencement dans l’art. (…) Tout le monde en fait, alors pourquoi pas moi ? » Et en effet, à part une installation, la galerie ne contient que des photographies. Une vidéo a été faite par sa fille et Eva Branellec, vidéaste, pour le vernissage, The Money Race : un personnage androgyne prend son envol à l’aide d’un billet et dégringole aussi vite de ce voyage. Les interprétations sont multiples et Yuna Blum souhaite que chacun ait un propre avis sur le sujet. Comme pour le travail de sa mère lui-même. « Les gens ont plein de choses à dire sur le sujet. Ils ont souvent envie de râler, cela donne à réfléchir. Les réactions sont drôles », s’amuse l’artiste autrichienne.

Mêler l’Art à la maladie : une passion depuis toujours

L’art fantastique qu’elle crée, largement inspiré de la demeure du Chaos, n’aurait pas la patte de Traudi si cela n’avait pas de rapport avec son ancien métier. Il y un an, elle expliquait au blog lavierennaise que « la seule différence entre les malades mentaux et les artistes, c’est que les malades subissent cette folie et les artistes la contrôle ». Fondatrice des ateliers artistiques dans le centre psychiatrique rennais, Tr.Kaos a toujours accordé une grande place pour ses patients, dans sa vie et dans ses lieux d’exposition. « C’est là-bas que j’ai mes plus beaux souvenirs », confesse-t-elle, sourire aux lèvres.

Ainsi, elle laisse à chaque fois une place pour des œuvres réalisées par des malades, autistes principalement. Cette année, elle a épaulé Marc-Antoine pour travailler autour du dollar. Elle avait trouvé ses croquis bons et lui a demandé d’en faire quelques uns pour l’exposition. Tr.Kaos a aussi accroché une illustration sur le thème de l’argent en hommage réalisé par un patient décédé. Michael, lui, a réalisé la bande son qui accompagne l’exposition jusqu’à dimanche à l’Orangerie du Thabor, où pièces de monnaie et froissement des billets s’entrechoquent.

 

Entrée gratuite. Ouverte de 14 à 18 heures.
Le week-end : 10-12 heures et 14-18 heures 

Tarek, fondateur du magazine Paris Tonkar, expose pour la première fois à Rennes

Pour la première fois, Tarek Ben Yakhlef, homme à multiples casquettes –photographe, dessinateur, reporter, écrivain, peintre, fondateur du magazine Paris Tonkar, etc.- expose à Rennes, dans la galerie de l’escalier, des Ateliers Terre et Feu, située à 9, rue Poullain Duparc. Ne pas s’étonner : au même endroit, il y a aussi le magasin LTM qui vend des pelotes de laine. Le lieu d’exposition, aux murs blancs et biscornu, se situe dans la boutique, à gauche quand on descend l’escalier.

La vingtaine de tableaux de l’artiste sont accrochés dans la galerie, regroupés sous le thème commun « Men at work #111 », jusqu’au 5 décembre. Explications de cet artiste qui se qualifie comme discret mais qui a des choses à dire.

 

« Donner une identité à [un] bonhomme standardisé »

Toiles multicolores où écritures et peinture se mélangent. Au premier coup d’œil, le badaud peut trouver cela enfantin. Le bonhomme masculin ou féminin qui se trouve partout dans les lieux publics, sont récurrents sur les œuvres de Tarek Ben Yakhlef, présentées à la galerie LTM. Seuls 2 tableaux de l’exposition mettent en scène d’autres êtres vivants ou non, un canard (Duck 1er) et une tête de mort (Hard Skull). Le projet de ce travail artistique a germé il y a deux ans, quand il a commencé à coller ce petit individu dans la rue. « J’aimais l’idée de donner une identité à quelque chose de standardisé comme ce personnage. (…) Et le coller là où on ne l’attend pas. Dans une ferme, par exemple, ou dans une rivière en Guyane », explique Tarek.

Le nombre 111 est omniprésent dans ses peintures. Les toiles sont toutes mises en scène avec ce chiffre symbolique. C’est aussi le nombre d’individus, de ronds et de têtes de mort, tous numérotés, que le fondateur de Tonkar magazine collera dans la rue. Pour l’instant, il en est rendu à environ 90. Tarek commente la signification du chiffre 111 : « Cela veut dire « je suis l’unique » en hébreu. » En effet, ses tableaux sont inimitables : « Je ne peux pas refaire exactement le même, ma main ne sera pas la même. Ni mon vécu. » Dans cette vingtaine d’oeuvres, beaucoup de techniques sont utilisées pèle mêle : bois, plastique, collage papier, mosaïque et bien entendu, peinture. « Je peins depuis très longtemps », dit-il, depuis 1990. Tarek est aussi connu pour être un spécialiste de ce qu’on appelle le mouvement « street art », l’art dans la rue. Selon lui, « la rue appartient aux gens, pas aux publicitaires. »

L’art urbain se développe à Rennes

Copyright : Expotempo ; Rue Saint-Guillaume, Rennes

Men at work #111, est, au final, “une double exposition”. On la retrouve dans l’espace public et dans les lieux d’expositions. Ce graffeur a déjà posé ce bonhomme dans une trentaine de villes françaises. Et elle en a vu du pays, cette mascotte. Le personnage inexpressif a été dans tous les continents, sauf en Afrique et en Australie. C’est ludique : Tarek le donne à ses amis qui le collent dans les endroits où ils voyagent. A Rennes, c’est la première fois que l’on peut les admirer sur des toiles, mis dans différentes situations : Men at work et Girl in the city.

En ce moment, un véritable regain pour l’art urbain se développe, timidement mais sûrement, à Rennes. Preuve en est : Stick,  créateur du blog Expo tempo qui recense une grande partie de cette pratique dans Rennes et ses environs, interviewé en juin dernier par le blog lavierennaise, le constate :  « Il n’y a jamais eu autant d’expressions dans la rue [à Rennes] qu’aujourd’hui. Il y a dix ans, c’était beaucoup plus calme. » L’artiste multitâches donne, lui aussi, son avis sur la question : « C’est bien [qu’il y ait de plus en plus de collages et de graffs à Rennes] et cela ne va faire qu’augmenter dans les années à venir. Quand une société va mal, beaucoup de personnes écrivent sur les murs (…) La première façon d’être visible, c’est dehors, dans la rue. »

Nouvelle pratique, le yarnbombing

La boutique LTM, juxtaposée à la galerie qui accueille Men at work #111, vend du matériel pour tricoter, alors forcément, la discussion vire sur la pratique du tricot urbain, autrement appelée yarnbombing. Elle est remise au goût du jour depuis quelques mois par Charlotte Iung, étudiante en arts plastiques à l’université Rennes 2, qui tricote en pleine rue. « C’est comme le graff : on recouvre des choses que les gens n’ont pas l’habitude de regarder. Ça les fait réagir. (…) », éclaircit cette dernière dans une interview accordée aux Rennais, magazine de l’information municipale (n°10). Pour le collage et les graffs, les réactions sont elles aussi positives. « Maintenant quand les passants qui nous voient, sortent leur téléphone portable, c’est pour prendre une photo. Et non pas pour appeler les flics, comme avant, » termine Tarek, en souriant. Ce n’est plus à démontrer, maintenant, les citoyens Rennais se (ré)approprient la rue comme mur d’expression. A suivre de plus près.

 

Exposition à voir jusqu’au 5 décembre à la galerie de l’escalier. Gratuite. 

Horaires : 
Lundi 14h-19h
Du mardi au samedi 10h-19h 

 

Lire l’article de Rennes1720 : « Le street-art rennais est-il dans la rue ? L’avis de Tarek »

L’exposition Kidults à voir jusqu’au 28 octobre, fascinante et déroutante

L’Epatante Gallery est une toute nouvelle galerie d’expositions rennaise, qui a ouvert en mai dernier. Sa première exposition a regroupé trois artistes, LYS, Rétrofuturs et Philippe Lagautrière. Elle a été très appréciée d’un point de vue global et en particulier, par le blog lavierennaise. La deuxième exposition se faisait attendre et la voici.

Depuis le 12 octobre, les œuvres de dix artistes internationaux ont investi l’ancien hôtel particulier, l’hôtel Saint-Gilles, à mi-chemin entre la faculté de droit et la place Hoche, sous un thème commun : Kidults. En français, à traduire par l’« adulescence », mot-valise entre adolescence et adulte. Plus que quelques jours pour en profiter, l’exposition se termine le 28 octobre.

Le nom est intriguant. Kidults, cela sonne bien. Ce nom est le fruit de la réflexion entre Juliette Pinto Maïa, directrice de l’Epatante Gallery, et Mijn Schatje, dessinatrice qui a participé à l’exposition. La traduction est étonnante : l’adulescence, qu’on peut qualifier comme une transition entre 15 et 25 ans. Cela fait penser au mot adolescence, utilisé pendant le Moyen-Âge tardif. Quand Clément Marot écrit son recueil de poèmes, l’Adolescence clémentine, en 1532, il fait référence à toute sa vie jusqu’à ses 30 ans. L’adolescence est considérée une période beaucoup plus longue à cette époque. Voilà pour la brève explication.

« On a voulu se moquer des adultes ‘branchouilles’ et de nous-même »

Kidults, c’est le syndrome de Peter Pan artistique. Ceux qui ne veulent pas grandir. Les toiles exposées à l’Epatante Gallery regroupent les thèmes de l’enfance, des nymphettes aux visages disproportionnés et de tout un bestiaire fantastique où les ours et les araignées se côtoient. « En créant cette exposition sur ce thème, on a voulu se moquer des adultes ‘branchouilles’. C’est aussi de l’auto-dérision car on adore ce qui est à la mode -en ce moment les animaux- et qu’on trouve ça beau et poétique », explique Juliette Pinto Maïa.

Dans les trois pièces, un univers est abordé. « A la base pour Kidults, il y avait une décoration dans chaque pièce. La chambre, c’est dans la salle rose (NDLR : la pièce principale, à droite de l’entrée). On avait même mis un lit en fer noir du Grenier des Frangines. La salle d’eau était dans celle du fond (NDLR : la pièce couleur vert goutte d’eau), à la découverte de son corps et dans la pièce verte foncé, c’était le jardin. » Une idée ambitieuse et originale que Juliette a dû enlever au dernier moment, faute de place. Il ne reste désormais plus que la décoration du jardin. L’indice : des champignons et une tête d’oie trônent sur la table ronde centrale.

Comme un goût d’Alice au pays des Merveilles : surprenant mais familier

« Je choisis aux coups de cœur les artistes que je souhaite exposer. J’ai choisi ce qui allait dans le thème », confesse Juliette. Contrairement à la première exposition où les trois artistes avaient des pièces attitrées, les réalisations des dix artistes, six français, deux anglaises, un italien et un autrichien, sont mélangées. C’est un choix pris par la jeune galeriste.

Pendant l’exposition Kidults, les visiteurs sont plongés dans un univers très onirique. Au dessus de la cheminée de la pièce Jardin, une tarte à la myrtille en plastique, attire le regard. Un peu comme Alice, dans Alice au pays des Merveilles de Lewis Carroll, attirée par la petite fiole sur la table ronde. Au dessus se trouvent les travaux de Kareena Zerefos. Sa Peau d’âne revisitée et ses ombres chinoises sont remarquables. Énormément de travaux sont exposés : plusieurs coups d’oeil sont nécessaires pour tout se remémorer. Le blog lavierennaise retiendra au premier regard les « cupcakes animaliers » et les portraits de jeunes filles réalisés par l’autrichien Stefan Zsaitsits, les poupées ensorcelantes de Mijn Schatje et les toiles de Frédérique Vernillet.

Au final, en regardant Kidults, le badaud est dérouté et ne sait où donner de la tête. Beaucoup de symboliques, d’humour, de loups et de méduses. Pour autant, l’univers si lointain paraît familier à la seconde approche. Telle chose fait penser à une autre et on peut rester longtemps à fixer un détail. Tout le monde s’y retrouve car au final, « dans le fond, on est tous des Kidults !», conclue Juliette.

 

Jusqu’au 28 octobre. De 14 à 18 heures. Gratuit.  

Cultures Electroni[K] – Muages : interview de Savannah Lemonnier

La douzième édition de Cultures Electroni[K] a commencé ce lundi et dure jusqu’au 14 octobre. Âge de la « déraison » comme l’appelle Anne Burlot-Thomas, l’une des organisatrices du festival, cette édition propose nuits électroniques, expériences entre nouvelle technologie et musique et projets artistiques innovants. Cela paraît un peu abstrait présenté comme cela mais ce festival est avant tout, « un bricolage ». « Si tu as des yeux et des oreilles, c’est un bon départ [pour appréhender Cultures Electroni[K]] », plaisante l’organisatrice.

Les deux organisateurs, Gaétan Naël et Anne Burlot-Thomas, mettent en avant les projets étudiants dans ce festival. Apporter toute sorte de public sur toute sorte de lieu : « amener le grand public sur les campus [étudiants] ». Savannah Lemonnier fait partie des projets qui ont été sélectionnés, cette année. Tout juste diplômée de l’Ecole européenne supérieure d’art de Bretagne (EESAB), la jeune rennaise a été choisie pour présenter son projet Muages, ce jeudi, à l’occasion de la troisième édition de la nuit Art et Sciences, au Diapason. Entretien avec cette jeune femme pleine de projets. Ses propos ont été recueillis par téléphone.

 

Bonjour Savannah ! Tu viens d’être diplômée en expression plastique, qu’est-ce que c’est exactement ?

Savannah Lemonnier : Oui, j’ai eu récemment mon diplôme de design à l’EESAB de Rennes. En cinquième année, mon travail était concentré sur la scénographie, les objets lumineux essentiellement. Pendant mes années d’études, je me suis  focalisée sur la respiration et le monde sensible. J’ai réalisé un prototype de Muages pour mon diplôme, objet avec lequel je souhaitais déclencher l’évasion. Julien Josse, ancien étudiant de l’ISEA à Rennes, m’a aidé à réaliser tout le côté ingénierie.

Qu’est-ce que cela veut dire Muage ?

Au départ, l’archétype s’appelait Nuage. La forme du nuage m’intéressait de par son côté aérien et léger. Muage est la combinaison du mot nuage et de mouvement. J’ai remplacé la première lettre par un m. Le mouvement représente la respiration: les Muages produisent des respirations lumineuses en fonction d’un rythme déterminé. Ce dernier a plusieurs variantes, il réalise de manière autonome des scénarios lumineux. Il interagit aussi, grâce à des capteurs, avec les personnes présentes placées en dessous et change son scénario en fonction.

Tu as dit que cela représentait un nuage…

L’idée première était de ramener la forme à l’imaginaire. Comme avec un nuage, dans le Muage, chacun y voit ce qu’il souhaite. Cela se forme, se déforme. C’est aussi un travail sur la matière que j’ai fait. Cela se rapproche aussi de la respiration avec les mouvements binaires de la cage thoracique : un Muage n’aura jamais la même forme. Pour les créer, j’utilise des plaques de mousse qui donnent du volume. Je les joins en les cousant. Je crée de manière spontanée, je ne donne pas de forme définie même si je l’oriente dans telle ou telle direction, cela se construit au fur et à mesure. Au final, il garde toujours une part de décision.

Sa confection, c’est un peu comme son fonctionnement même, non ? Interagir avec l’autre tout en gardant une part d’autonomie. 

Oui, je pense que la matière a une propre vie. Le métier de designer, c’est de la guider. Cette autonomie, ma réalisation l’a grâce au circuit imprimé Arduino. Cela permet de programmer de manière aléatoire différents scénarios, comme des « battements » de lumière. Trois paramètres sont à prendre en compte pour en créer de nouveaux : la rapidité, l’intensité et la durée. Cela modifie chaque nouvelle respiration du Muage. C’est dû notamment, à la quantité de monde en-dessous du luminaire et de leurs interactions.

Tu as dit que tu avais crée un premier Muage, lors de ta cinquième année d’étude. Mais ce projet, c’était une commande du festival Cultures Electroni[K] ou tu l’avais déjà réalisé auparavant ?

Lors du salon du jeu à Brest en mars dernier, j’exposais mon prototype. Une connaissance à moi, qui travaille dans l’ingénierie, a parlé de mon projet à Cyril Guillory (NDLR : de l’association Electroni[K]) qui a été intéressé. Ensuite, l’association m’a passé commande de trois Muages que j’ai réalisé pour le festival, dans le cadre d’une scénographie dans le hall du Diapason (NDLR : scène culturelle de l’université Rennes 1).

Dans l’idée de Muages, tu explores notamment le sensoriel, l’un de tes domaines d’études. Qu’est-ce qui t’intéresse dans cette démarche ?

C’est tout d’abord un goût personnel. J’ai toujours aimé la matière, que ce soit de la matière froide comme la céramique ou chaude, comme la mousse. Dans la société actuelle, on est peu sollicités par le toucher, l’odorat. Tout est un peu aseptisé. Je voulais qu’on retrouve un contact privilégié avec la matière, que quelque chose se crée entre le spectateur et l’objet, que les deux soient impliqués. Je privilégie l’expérience au côté fonctionnel.

L’espace est aussi l’un de tes axes de réflexion.

Le fonctionnement du Muage découle de l’espace. Je souhaitais amener vers une expérience sensible. Un objet ne peut pas être appréhendé sans sa dimension spatiale. Cela révèle ou non son existence. A chaque endroit où l’on se trouve, nous y sommes connectés.

Tu as crée un collectif les Gallinulles avec Marine Le Moal, diplômée de l’EESAB Rennes, elle aussi. Toutes les deux, vous prônez un « engagement plastique partagé », notamment, dans l’écologie.

Avec Marine, j’ai réalisé les abris pour les canards au Parc Oberthür ainsi que les Lombricomposteurs primés au salon Jardin jardin. On fait aussi en parallèle nos travaux personnels. Marine est plus spécialiste pour savoir comment mettre l’urbain dans un milieu naturel et moi, plutôt de tout ce qui relève de l’univers sensible. En collaborant toutes les deux, nos projets sont plus fonctionnels et ont plus un impact comportemental. En ce qui concerne l’écologie, je pense qu’elle est inhérente au design. Cette notion doit être digérée avant même de se lancer dans un projet. Le design peut traiter de certaines questions, notamment, comme celui de l’engagement écologique.

Y en a-t-il un dans Muages ?

Ils sont composés de lumières LED et cela consomme peu d’électricité. Je me suis aussi beaucoup inspirée de la Nature mais la mousse que j’ai utilisé est synthétique. On ne peut pas dire que ce soit un objet écologique, ce serait tiré par les cheveux.

Quel impact souhaites tu avoir sur le public ?

Tout d’abord, ressentir le plaisir de regarder les choses sans comprendre quoi que ce soit. J’espère activer l’imaginaire des personnes.

As-tu des projets à venir ?

Je suis actuellement en stage et je travaille avec le Studio Massaud ainsi que le designer Vincent Dupont Rougier. Avec le collectif Gallinulles, on expose aussi cette semaine le lombricomposteur lors de la Biennale Déco et Création, à Pantin. D’ici quelques mois, on espère pouvoir l’éditer. Je vais aussi continuer à passer des concours avec Marine. On forme une équipe. Mais pour l’instant, pas de projet prévu d’ici décembre. Je suis sur plusieurs fronts professionnels.

Jeudi 11 octobre, de 20 heures à 1 heure. Entrée gratuite. Diapason.

Cultures Electroni[K] – Projet Pilot 1 : interview d’Antoine Martinet et Elsa Quintin

La douzième édition de Cultures Electroni[K] commence le 8 octobre prochain. Âge de la « déraison » comme l’appelle Anne Burlot-Thomas, l’une des organisatrices du festival, cette édition propose nuits électroniques, expériences entre nouvelle technologie et musique et projets artistiques innovants. Cela paraît un peu abstrait présenté comme cela mais ce festival est avant tout, « un bricolage ». « Si tu as des yeux et des oreilles, c’est un bon départ [pour appréhender Cultures Electroni[K]] », plaisante l’organisatrice.

Cet événement s’installe dans de nombreux lieux Rennais : au Diapason, au Tambour, aux Champs Libres, etc. et aussi, dans le lieu emblématique de la ville de Rennes, son parlement. Ce bâtiment imposant du XVIè siècle accueillera du mardi 9 octobre jusqu’au 10 novembre, le projet Pilot 1 réalisé par deux dessinateurs rennais, Elsa Quintin et Antoine Martinet, plus connu sous le nom de Mioshe. Il est le résultat de deux ans de dessin avec pour seul outil, le stylo bille. Rencontre avec ces deux artistes qui reviennent, pour le blog lavierennaise, sur leur rencontre, le projet Pilot exposé pour Cultures Electroni[K] et leur actuelle deuxième collaboration.

 

Blog lavierennaise : Bonjour Elsa et Antoine ! Vous avez réalisé le projet ensemble, comment vous êtes-vous rencontrés ?

Antoine Martinet et Elsa Quintin : On s’est rencontrés à une soirée organisée par les Agités du Bocal.

Votre projet est d’assez grande envergure au niveau de la taille notamment, comment cela vous est venu à l’idée ?

On avait envie de faire un grand dessin ! (Rires) Tous les deux, on avait envie de changer du format conventionnel. Là, c’est démesuré. La folie des grandeurs !

Et pourquoi vous êtes-vous associés tous les deux ?

Parce qu’on aimait bien le dessin ! (Rires) Et on a cette particularité de faire tous les deux du dessin au trait. On se retrouvait assez bien dans ce projet, celui de faire un dessin qui ressemble à une gravure. A grande échelle, avec beaucoup de gestes répétitifs.

Dans une vidéo où tu avais été interviewée Elsa, tu disais que ce projet c’était une façon de mettre à l’honneur le dessin.

C’est le fait de faire à la main, lentement. Sans forcément se réfugier derrière un projet très bien formulé qui en met plein la vue et qui fait parti des discours-fleuve des expositions d’art, en général. Désormais, le but de l’œuvre, ce n’est plus forcément mettre à l’honneur le dessin. Le projet Pilot a été commencé en 2009 mais on le continue au fil du temps et on a plus du tout le même rapport au dessin par rapport au début. Actuellement, on est sur un deuxième projet, basé sur la même structure avec huit panneaux, mais qui change sur la manière de travailler et de traiter l’image. Le premier projet, Projet Pilot 1, était une compilation d’une multitude de dessins qu’on avait envie de réaliser ensemble et les articuler sur un grand panneau. Beaucoup plus dans l’imaginaire, dans l’association d’idées qui nous sont propres. Celui qu’on est en train de faire, c’est une reproduction d’un montage photo construit par nous-même. Les deux n’ont rien à voir. Pourtant, c’est la même technique et les même panneaux. C’est ça qui est intéressant.

Copyright Elsa Quintin/Antoine Martinet

La performance dans votre première œuvre, ce n’était pas forcément le résultat mais aussi la manière de faire…

Déjà, il y a le fait de travailler à plusieurs. Dans le premier dessin, il y a des zones où la notion d’auteur est relativisée. On a partagé le travail. Des fois, quand une partie que l’un de nous deux avait réalisé était faible, l’autre la rehaussait et inversement. Cette notion d’auteur est assez rare, en fait : par égo, on ne repasse pas le dessin de quelqu’un. On n’a pas conservé notre identité, mais on est quand même reconnaissables ! (Sourire) Il y avait des thèmes qui nous appartenaient, réalisés avec des gestes différents. Contrairement à notre second projet où on ne peut plus reconnaître qui a fait quoi, juste la manière dont la personne appuie sur le crayon.

Le travail que vous avez réalisé avec Projet Pilot 1 fait référence aux corporations médiévales. Est-ce que le Moyen-Âge est une période importante pour vous ?

Au niveau des artistes, oui. Antoine est très proche dans son univers graphique de personnes comme Bosch et Bürgel.

Il y a de la mythologie aussi dans vos dessins.

Énormément ! Toute la fantasmagorie possible et inimaginable. Cela dit, c’est de la « fausse » mythologie. On reprend surtout des formes qui nous intéressent et on les vide un peu de leur sens. Quand tu mets Sainte Agathe qui se fait couper les seins à côté d’un dinosaure, cela n’a ni queue ni tête !

Est-ce qu’il y avait un fil conducteur dans Projet Pilot 1  ?

Oui, on savait ce qu’on allait faire. Il y avait une maquette imaginaire : on avait découpé chaque partie et tracé la forme générale de notre dessin pour savoir comment on allait occuper l’espace. Le plus dur, c’était de s’occuper des liaisons. C’est-à-dire, de raccorder telle forme avec telle autre pour que ça s’emboîte. C’est un peu comme le maçon qui doit enduire ses briques ! (Rires) Il faut trouver le bon enduit.

Vous aviez des moments de liberté pour dessiner ?

Dans notre première collaboration, oui. Dans le deuxième aussi. On a des moments de liberté mais ce n’est pas forcément le fait d’imaginer n’importe quoi et de dessiner ce que tu veux. C’est plus que des fois, il y a des grandes surfaces à faire. Du coup, trouver des manières de bouger le bras, comment tu vas rythmer ton dessin, etc. Chacun fait son traitement plastique comme il le souhaite.

Quand a commencé votre projet actuel, Projet Pilot 2 ?

En mars dernier. Et il y en a encore pour un an et demi. 2014. Après la dernière exposition qu’on a faite de Projet Pilot 1 (NDLR : en janvier dernier, à Metz), on a décidé d’en faire un deuxième. Cela s’est fait sur un coup de tête. On avait continué à faire nos projets chacun de notre côté depuis que le premier était terminé. Et en fait, cela nous manquait, un immense labeur à continuer. On s’est dits que c’était dans la durée que cela prenait du sens. Faire des séries.

Le principe de faire des mises en commun et travailler chacun de son côté sera le même ?

Oui, on fonctionne comme cela. Ensemble, on voit comment faire évoluer notre dessin, produire des effets. On se montre des techniques.

Dans votre première œuvre très riche visuellement, est-ce que vous avez pensé au regard du spectateur, à la façon dont il allait percevoir ce dessin ?

Pas forcément. Tu y penses un peu mais ce n’est pas ça qui motive. Oui, c’est toujours agréable de voir les gens scotcher dessus pendant des heures. Mais on est les premiers à en être obnubilés : le temps qu’on passe devant à le regarder et à dessiner… On est les premier spectateurs de notre œuvre.

Vous avez déjà présenté ce projet à Rennes, à Lip-Studio, l’un de vos partenaires, en décembre 2011. Pour Cultures Electroni[K], ce sera au Parlement de Bretagne. Est-ce qu’il va y avoir une autre mise en scène ?

Oui, ça va être différent. A Lip-Studio, les huit panneaux étaient posés sur la structure. D’ailleurs, c’est grâce à ce studio que le Projet Pilot a pu être mis en place et on leur en est très reconnaissants. Au Parlement, ce sera une cloison qui cassera l’espace du lieu. Le revêtement sera de la toile blanche.

Copyright Antoine Martinet

Copyright Antoine Martinet

Après le projet Pilot 1, puis le second actuel, peut-être un troisième ?

On est dans le présent, pour le moment. On en a pour jusqu’en 2014, on verra après si on en a envie, si cela a du sens à ce moment là d’en faire un.

Vernissage le mardi 9 octobre, à 19 heures, au Parlement de Bretagne. Ouvert à tous.

Cultures Electroni[K] : interview de Vincent Broquaire

La douzième édition de Cultures Electroni[K] commence le 8 octobre prochain. Âge de la « déraison » comme l’appelle Anne Burlot-Thomas, l’une des organisatrices du festival, cette édition propose nuits électroniques, expériences entre nouvelle technologie et musique et projets artistiques innovants. Cela paraît un peu abstrait présenté comme cela mais ce festival est avant tout, « un bricolage ». « Si tu as des yeux et des oreilles, c’est un bon départ [pour appréhender Cultures Electroni[K]] », plaisante l’organisatrice.

Et la première création réalisée pour cette douzième édition, est l’affiche. Chaque année, Gaétan Naël, le second organisateur, demande à un artiste de réaliser le visuel. Cette année, Vincent Broquaire a été sollicité. Jeune dessinateur touche à tout, il s’est prêté au jeu et a concocté dans sa vaine, un dessin qui représente une éclipse. Pour commencer le festival en douceur, Vincent Broquaire expose depuis lundi dernier, sept dessins de sa nouvelle collection accompagnés de plusieurs animations, créées pour l’occasion, à l’espace Crous, en face du Théâtre national de Bretagne. Entretien avec ce jeune breton plein de talent(s).

 

Bonjour Vincent ! Tu es diplômé de l’ESAD (Ecole Supérieure des Arts Décoratifs) Strasbourg depuis 2010. Tu as été beaucoup sollicité, depuis…

Oui, ça s’est assez vite enchaîné après la fin des études. Je le redoutais un peu mais les projets personnels que j’avais amorcé pour mon diplôme ont continué après. Cela s’est prolongé.

Et cette année, le festival Electroni[K] t’a repéré. Tout d’abord, est-ce que tu peux expliquer ton parcours professionnel ?

J’ai fait les arts décoratifs, en communication graphique. En sortant de l’école, je me suis dirigé dans le domaine de l’art contemporain. Maintenant, je travaille avec la galerie parisienne d’art contemporain, l’Xpo Gallery. C’est un événement qui a pas mal défini de choses. Même si moi mon travail, il n’a pas changé. Il est toujours transversal : pas très loin du graphisme, de l’illustration mais majoritairement dans l’art contemporain.

Pour Electroni[K], tu as réalisé l’affiche et le teaser du festival. Cela t’a pris combien de temps ?

L’affiche, cela a quand même pris un certain temps ! Gaétan (Naël, l’un des organisateurs du festival, NDLR) m’a contacté fin de l’année dernière. Il m’avait dit ce qu’il voulait faire avec moi. J’avais déjà vu des choses d’Electroni[K] avant, en venant à Rennes. Pour l’affiche, j’avais sorti déjà des propositions. On en a pas mal parlé, on les a remises en question. Au bout d’un moment, j’ai trouvé ce visuel-là. Dès le début, je sentais que ça pouvait être ça. Et Gaétan a tout de suite accroché. Le teaser, au départ, je devais le faire tout seul et au final, cela a changé. Cela s’est mis en place dans une maison de quartier avec des jeunes. Cela a changé la manière dont je l’envisageais. Je me suis mis en avril à faire l’atelier. Cela a duré une semaine. Ensuite, de mon côté, j’ai fait le montage et les couleurs, etc.

Escape from the sun, 2012, dessin au feutre, courtesy of XPO Gallery

Escape from the sun, 2012, dessin au feutre, courtesy of XPO Gallery

L’affiche représente une éclipse…

Oui. En fait, j’ai pas mal de dessins qui traitent de l’Homme qui agit sur la Nature ou qui la détourne. Là, il est vraiment question de ça. Sur l’affiche, au départ, le soleil devait être en jaune et je l’ai laissé en blanc car j’avais envie que cela reste très proche du dessin. Que cela ne devienne pas une sorte de surenchère, je n’avais pas envie d’en mettre trop. Le bleu donne le ciel. Mais pour moi, il n’y avait besoin d’aucune autre information. Dans le teaser, il est aussi question d’une éclipse mais je voulais que cela soit complètement différent. Un rappel mais pas une redite de l’affiche.

Alors, comment ce serait un monde sans soleil ?

Ah ! J’en sais rien ! (Rires) En tout cas s’il n’y en avait pas, je ne pourrais pas en jouer.

C’est vrai que tu y fais souvent allusion dans tes dessins.

Oui, en tout cas, dans cette série qui est à l’exposition. Cela fait un an que je détourne un peu les choses essentielles de la Nature, le soleil, la montagne, etc. Des choses très simples qu’on reconnaît très facilement et un peu universelles.

Dans une interview faite par Julia d’Electroni[K], tu disais que ton projet artistique basé sur la Nature, les nouvelles technologies, s’est lancé à partir de la performance Screen to screen (Ecran à écran, littéralement en français, NDLR), réalisée pendant tes études.

Moins pour la série avec la Nature. Dans cette série là, ce n’est pas tout à fait la nouvelle technologie dont il est question. C’est plutôt la machine, le mécanisme. On n’est pas vraiment dans la nouvelle technologie. Screen to screen a donné le ton sur la manière dont je vois les nouvelles technologies et dont on peut les utiliser. Pour cette performance, on dirait qu’il y a un logiciel de programmation mais en fait, je ne suis pas du tout programmeur. J’ai vraiment joué sur ça, l’illusion donnée par la technologie. Dans mon travail en général, c’est souvent tourner en dérision ou regarder d’un autre angle. C’est en général comme ça. Il y a de toute façon un ton et un esprit qui est là.

Ta nouvelle série de dessins exposée à l’espace Crous, comment cela t’est venu à l’esprit ?

C’est une série que j’avais déjà pas mal entamé, en partie avec mon galeriste à l’Xpo Gallery. On a fait beaucoup de salons où ces dessins étaient présentés. Pour cette expo, j’ai voulu marquer un peu le coup, avec en plus de nouvelles animations qui appuient ce travail.

Que veux-tu faire passer comme message à travers tes dessins ?

Mhhh… Je ne sais pas s’il y a vraiment un message, dans mon travail. C’est plutôt poser des questions, en fait. Je n’y réponds pas, j’en pose. Ce n’est pas vraiment un message, c’est un questionnement sur le monde, comment il fonctionne, comment nous on le fait fonctionner, comment le monde est fragile, comment on peut le fragiliser, le détruire. Comment questionner ce qu’on a toujours autour de nous qui paraît immuable et rassurant. Après, il y a aussi un but de faire rire et de ne pas prendre au sérieux certaines choses qu’on voit. La vie, en général.


Tu as dit dans une interview, que pour toi, dessiner c’est s’engager.

Oui, aussi. C’est vrai. Ce que j’aime bien dans le dessin, c’est son pouvoir communicatif, surtout quand c’est assez simple. Quand je dessine, j’essaye de ne pas trop m’embêter avec des fioritures et les couleurs. J’essaye d’aller assez prêt de l’idée et du fond. J’aime bien quand la tension entre la forme et le fond est très proche. Du coup, on comprend très vite de quoi il s’agit. Même dans Screen to screen, c’est vraiment une sorte d’engagement. Parce que le dessin m’a permis d’aller beaucoup plus loin que le dessin lui-même. C’est-à-dire de sortir d’une feuille de papier et d’aller dans un écran. Tout d’un coup, j’étais proche de personnes qui faisaient de la programmation et de l’art numérique. Le dessin, c’est un engagement. On peut aller très loin avec.

Pour faire le teaser, tu as dit que tu avais travaillé avec des jeunes de la Maison de quartier Sainte Thérèse. Hier (mardi 2 octobre, NDLR), tu as également fait un atelier. Est-ce que c’est important pour toi de travailler avec des jeunes ?

Oui, c’est important parce que j’ai envie que mon travail soit relativement accessible. Pas simpliste mais pas non plus élitiste. Après ça, ça se contrôle pas tellement mais c’est important que les jeunes et ceux qui ne sont pas forcément intéressés à l’art puissent s’y intéresser. L’art, c’est comme tout. Des fois, on n’aime pas trop mais il y a quand même une porte d’entrée.

vue de l'exposition à l'espace CROUS, animation : Get Milk, 2012

vue de l’exposition à l’espace CROUS, animation : Get Milk, 2012

Tes dessins sont quand même « grand public » avec l’utilisation de l’humour…

Des fois, il y a des choses que les gens saisissent moins. Justement, faire des ateliers comme ça, ça permet de donner une visibilité à des gens qui n’ont pas forcément accès à la culture, notamment avec les ateliers que je fais en ce moment, dans les centres d’accueil. Je pense que c’est intéressant pour eux et aussi, pour moi. C’est important de rester très proche du public et des jeunes.

Tu es venu plusieurs fois à Rennes, notamment pour les Bouillants en 2011. Dans le teaser, tu fais référence à la ville, avec les tours des Horizons (Habitats à Loyers Modérés dans le nord de Rennes, NDLR). C’est un clin d’oeil ?

Oui, c’est vraiment ça. Parce que ça se passe à Rennes et parce que je suis attaché à cette ville. J’y suis venu pas mal de fois pour travailler. Je connais pas mal de personnes, du coup faire ce clin d’oeil c’était une manière de dire « Voilà, je me sens aussi rennais, quelque part ». J’ai envie de montrer que je suis toujours dans cette ville car j’ai encore envie d’y faire des choses.

Est-ce que tu vas continuer à faire des performances comme Screen to screen ?

Je ne sais pas encore mais je sais que Screen to screen a ouvert une voie du point de vue nouvelle technologie. Cela a montré aussi que le dessin ne reste pas sur le papier. On peut totalement lui donner une autre dimension. Ça, c’est un truc qui m’a vachement influencé. S’il y en a d’autres, ce sera différent. Si je suis amené à refaire Screen to screen, ce sera sûrement d’une autre manière. Je n’ai pas envie de faire une autre performance qui lui ressemble. Si c’est le cas, il n’y aura peut-être pas de dessin. Je me laisse les portes ouvertes là-dessus. Pour l’instant, je me concentre sur des projets d’installation, des choses en volume, de la photographie. Tout ça m’intéresse un peu. J’essaye de m’ouvrir à d’autres champs, d’autres perspectives.

Et cela fera référence à tes dessins ?

J’avais déjà fait une exposition avec de la photographie à la galerie Delko, à Rennes. J’avais mis un petit panneau avec une écriture, mis en scène dans un paysage. Dans ce que j’ai déjà fait avant, je ramène le dessin dans une photo. Avec l’ensemble, cela donne quelque chose. C’est plutôt de la photo, dans ce sens-là : une intervention du dessin ou quelque chose d’écrit, une « mise en scène ».

Tu comptes garder cette façon humoristique de détourner les choses ?

C’est ma manière de fonctionner. Des fois, je me dis que mon travail devient peut-être trop sérieux…


Tu tournes aussi en dérision ton propre travail.

J’essaye de ne pas prendre au sérieux ce que je vois autour de moi ainsi que mon travail. Ce que j’ai envie de montrer aussi, pas pour cette exposition, mais pour les futures, c’est que mon travail j’ai envie de le critiquer. De me moquer de la façon dont je dessine.

Alors, que lui reproches-tu ?

Oh, rien mais je pense qu’il faut avoir du recul par rapport à ce qu’on fait. De ne pas trop prendre au sérieux les choses. C’est ce qui nous pousse à évoluer et à ne pas faire tout le temps la même chose. C’est important pour moi.

Dans quelle voie comptes-tu évoluer ?

Ce n’est pas forcément ouvrir dans d’autres domaines mais me renouveler à propos des « sujets » dont je parle dans mon travail et au domaine dans lequel je m’intéresse. Cela peut aussi s’élargir d’un coup, ainsi que dans la forme. C’est-à-dire pas forcément un dessin encadré à un mur mais cela peut être aussi sur un mur, au plafond, au sol, etc. Cela peut aussi renouveler la manière d’envisager l’espace. Cela peut donner plein de choses !

 animation projetée, vitrine extérieure, Eclipse (version 2), 2012

animation projetée, vitrine extérieure, Eclipse (version 2), 2012

Tu as d’autres projets en cours ou des idées de projets ?

Le prochain gros projet, c’est une exposition solo à l’Xpo Gallery à Paris. Cela sera début janvier. Il y aura beaucoup de nouvelles choses aussi, évidemment beaucoup de dessins mais aussi des installations, objets, photographies. Ce que j’ai envie, c’est qu’il y ait plusieurs médiums. Pour moi, pour qu’une exposition fonctionne bien, il faut qu’il y ait plusieurs moyens de s’exprimer. C’est aussi à l’image de mon travail. Je m’intéresse aux nouvelles technologies donc du coup, ça joue beaucoup de choses sur la manière dont je vais montrer mon travail. Ce que je veux, c’est donner quelque chose qui a du relief, quelque chose qui communique d’un dessin à un objet.

Propos recueillis par Manon Deniau

Exposition à voir à l’espace Crous – du 1er au 13 octobre de 10h à 19h – Entrée gratuite – plus d’infos sur http://www.electroni-k.org/vincent-broquaire.html

Si vous souhaitez en savoir plus sur son travail : Vincent Broquaire anime une conférence lundi 8 octobre, à 17h30, à l’école des Beaux-Arts.

Salsa Bretana accueille la coupe de France de salsa

Du 13 au 23 septembre, l’association de danse cubaine Salsa Fievra fait bouger le public Rennais pour la quatorzième fois consécutive, lors de son festival, Salsa Bretana ! Connu comme « le festival qui fait durer l’été », ce dernier accueille cette année un évènement de taille, la deuxième coupe de France de salsa, le 22 septembre. L’enjeu est donc considérable pour le festival et pour la ville de Rennes. Sans oublier les soirées dansantes et les initiations.

Le blog lavierennaise a rencontré Marie Royon, responsable de l’organisation, pour discuter mélange des cultures, soutien financier de la ville, sensibilisation auprès des étudiants et programmation artistique. 

 

Blog lavierennaise : Le festival Salsa Bretana a été crée en 1999 par Salsa Fievra. A l’époque, Rennes n’était pas très branchée salsa ?

Marie Royon : En effet. Salsa Fievra a été la première association à proposer de la salsa sur Rennes. Ensuite, avec les années, cela s’est développé par le biais d’autres associations car on ne fait pas toutes le même style de danse. C’était le but que cela se propage pour qu’il y ait une mixité dans la même ville. L’idée de faire ce festival était de proposer un temps convivial dans l’année qui permet de faire découvrir cette pratique artistique à un grand public en ville et sur la périphérie rennaise.

Comment s’est passé le choc des cultures cubaines et bretonnes ?

Il n’y en a pas eu car la Bretagne est une vraie terre d’accueil pour les cubains. A Cuba, on sait bien, ce n’est pas très facile pour avoir des locaux pour enseigner. Les professeurs, eux, cherchent à se faire connaître alors ils se forment là-bas mais n’arrivent pas à y gagner leur pain. Il se trouve que les groupes de musiciens cubains ont beaucoup immigré en Bretagne, pour je ne sais quelle raison, dans le secteur de Rennes. Par la suite, beaucoup de professeurs ont suivi le mouvement et se sont installés en Europe. Aujourd’hui, la salsa est très répandue en Espagne et beaucoup dans les pays de l’Est. Il ne se passe pas un jour sans qu’il ne se passe un événement de salsa dans le monde… (Rires) De plus, cette danse est très fédératrice. Si un novice vient à une soirée salsa, il s’amuse quand même ! Tout le monde invite tout le monde, ce n’est pas sectaire, d’où son succès.

En parlant de mélanges de cultures, le 22 septembre prochain aura lieu la création artistique « Cuba y Breizh », lors de la soirée Salsa Bretana. Pouvez-vous m’en dire plus ?

« Cuba y Breizh » est à l’initiative du Bagad de Cesson-Sévigné (NDLR : commune située à la périphérie rennaise), un groupe de musiciens qui tourne beaucoup dans la région rennaise et ailleurs. Depuis quelques années, ils essayent de montrer des œuvres originales à leur public. L’année dernière par exemple, ils ont fait une création avec une compagnie de danse africaine. Il se trouve qu’il y a une petite communauté de musiciens cubains sur Rennes. Et cette année, ils se sont mis ensemble et ont collaboré pour la création artistique, « Cuba y Breizh » qu’ils présentent pour la première fois, le samedi 22 septembre. Cela représente une trentaine d’artistes sur scène, le festival Salsa Bretana est très content de les accueillir ! Cela promet ! (Rires)

Cette année, vous programmez sept compagnies et/ou artistes…

En effet, il y a deux troupes parisiennes, Yamatimba et Palamambo Danse Compagnie, qui tournent notamment dans les festivals européens… Ils sont régulièrement sur scène. Pour certains, ils en vivent. Pour d’autres, ils font cela à côté d’un autre métier.

J’ai remarqué que c’était une programmation majoritairement francophone, est-ce un choix ?

C’est volontaire pour l’instant. On se dit que le public qui les verra lors du festival Salsa Bretana, peut les retrouver dans d’autres villes françaises. C’est aussi une question de budget, faire venir quelqu’un d’un autre pays, cela représente un coût. Le festival existe depuis quatorze ans mais monte en puissance petit à petit. D’année en année, on essaye de faire venir des artistes plus connus, plus réputés. On y va progressivement mais sûrement.

Cette quatorzième édition accueille plus d’artistes qu’avant, quelles en sont les raisons ?

En 2002 et 2003, l’association avait programmé de gros plateaux artistiques avec beaucoup de professeurs très réputés. Cela avait très bien fonctionné mais on a un peu réduit l’allure depuis. Ce n’est pas parce que cela avait été raté mais c’est parce que notre association tient surtout à l’engagement bénévole. C’est le jeu, il y a beaucoup d’étudiants qui vont et viennent dans l’association. Il y a des équipes plus ou moins nombreuses, plus ou moins impliquées selon les années. Pour la quatorzième édition, les bénévoles sont très actifs, ce qui nous permet de relancer la machine pour cette année et les années à venir !

Comme vous le disiez, le festival prend de plus en plus d’ampleur. La Ville de Rennes vous aide très activement…

A la base, c’est un partenariat avec la Nuit des 4 Jeudi (NDLR : ND4J, soirées gratuites organisées par la ville de Rennes). La soirée d’ouverture du festival, le 13 septembre, à la salle le Liberté rentre dans ce cadre, ainsi que la soirée de clôture, le 22. Le Ministère de la Culture nous donne aussi des subventions. Dans le contexte de crise actuelle, on reçoit moins de subventions évidemment mais cette année, ils ont misé sur ce festival là.

Est-ce que ces coups de pouce ont un rapport avec la venue de la deuxième coupe de France de salsa lors du festival ?

Pas spécialement car le partenariat avec la ville de Rennes a été négocié à part. Mais c’est vrai que tout ce qu’on va amener comme projet original va les intéresser. En effet, eux, ce qu’ils veulent montrer c’est qu’il se passe des choses sympa à Rennes. Nous, on essaie d’être à la hauteur de leurs attentes.

C’est la grande nouveauté de cette édition : la deuxième coupe de France de Salsa arrive à Rennes pour la première fois lors du festival ! Quelles en sont les modalités ?

Cette année, la Salsa a été reconnue comme sport mondial. Et une discipline qui fait partie de cette catégorie, pourra accéder aux jeux olympiques. Le but de la coupe de France, c’est de repérer des couples qui vont constituer une équipe nationale. Le couple qui gagnera cette Coupe représentera la France en juillet 2013 à Cali, en Colombie.

Le festival promue la culture afrocubaine et afro-caribéenne via la diffusion de films comme Chico & Rita au Cinéville le 18 septembre, des cours d’initiation à la danse, des ateliers culinaires, des expositions, etc. Vous aviez travaillé avec l’association Rennes-Cuba les années précédentes, pourquoi l’avoir cessé ?

Je ne peux pas répondre précisément à la question mais je ne pense pas que Rennes-Cuba soit encore très active dans le milieu associatif. On essaye de travailler beaucoup avec des associations étudiantes. Cette année, dans l’équipe, il y a des étudiants de l’ESC de Rennes (NDLR : Ecole Supérieure de Commerce) et on collabore avec leur Bureau des Arts (BDA). Le fait d’avoir un partenariat avec la ND4J, adressée à un public majoritairement étudiant, c’est un engagement de notre part.

 Retrouvez le programme du festival : ici

 

Petit Bazar de Saint-Martin #4 : Rencontre

Ce week-end se déroule la quatrième édition du « Petit bazar » à 18, rue du canal Saint-Martin, à Rennes. Bijoux, horlogeries, poupées, vêtements, photographies ou encore illustrations sur gravures, voici un aperçu des créations que proposent les quinze artisans présents pour cette édition. Le blog lavierennaise a rencontré la fondatrice de ce marché de la création artisanale, Servane Joucla pour nous en dire plus.

 

Petite cour intérieure verdoyante encadrée de maisons en briques rouges, le lieu où se passe le marché de la création, le Petit Bazar, n’est en rien l’endroit du marché traditionnel. C’est dans un lieu de proximité et « intime », de voisinage, que Servane Joucla a souhaité créer son propre marché. C’est donc dans sa cour mitoyenne que les badauds pourront se balader le temps de ces deux jours pour découvrir quinze créateurs-artisans.

Réunir les créateurs

Depuis six ans, Servane a crée sa marque de vêtements Velvet etc. et confectionne des vêtements pour enfants. D’abord pour nouveaux nés, elle s’est consacré à tout type de vêtements pour enfants « pour suivre la croissance de [sa] fille » qui a désormais huit ans. Sa spécialité ? Mélanger la couleur noire et les motifs colorés et fleuris. Elle crée aussi des casquettes de tout âge et de toute taille qui remportent un gros succès.

Cette amoureuse des habits pour bébés est partie d’un constat personnel auquel elle est confrontée depuis ses débuts : « les créateurs sont très isolés. Chacun fait son truc dans son coin, chacun a son réseau. (…) La création à Rennes, ça manque contrairement à Nantes où ça bouge énormément. » Pour pallier ce problème, Servane a crée son propre marché de la création qui a lieu chaque année pendant le week-end du feu de la Saint-Jean. « J’aime bien cette fête car c’est très familial », confie-t-elle.

Marché artisanal et familial

Servane invite une quinzaine de créateurs chaque année en prenant soin d’inviter la moitié de nouveaux. Cette année, sur quinze créateurs, huit le sont. Pour choisir, elle se concentre sur le côté artisanal du métier, le « système à l’ancienne ». Montrer ce que fait l’artiste, comment il procède et échanger. Ce week-end en est l’occasion, c’est ce qui importe le plus à Servane. « Un créateur qui vient juste apporter ses toiles et qui ne reste pas le week-end, cela ne m’intéresse pas », dit-elle franchement.

Elle se concentre aussi sur le professionnalisme des créateurs, sur la finition des objets ou des confections, par exemple. Plus dur encore, cette créatrice essaie de choisir autant d’hommes que de femmes. Il y aura quatre hommes, un sculpteur sur bois, un horloger et un photographe, un vitrayiste. Ce week-end, les Rennais pourront y voir les Barbe à papiers et leurs vélos ambulants où des cours de gravure seront donnés, Carole et ses poupées Paulette ainsi que la galerie de l’Antre Temps. Mais pas seulement ! Le reste, il faudra le découvrir par soi-même : photographie, vêtements pour adultes et enfants, sculpteurs ou encore illustratrices.

 

Gratuit – Samedi de 12 h à 20h

Dimanche de 10h30 à 18h

Exposition à l’Epatante Gallery

La Marelle éditions existe depuis huit ans. La Marelle en papier, maison d’édition de papeterie, a été créée dans la foulée. Cela a commencé par de la vaisselle fantaisie et cela a fini par prendre de l’ampleur depuis 2003. L’univers fantaisiste et enfantin de Mlle Héloïse alias Pascale Nivet plaît et se dérive en sacs, en badges et en boîtes. En 2012, la Marelle éditions déménage et s’installe à l’étage d’un hôtel particulier, rue Jean Guéhenno. 

L’Epatante Gallery, elle, est toute nouvelle et se situe au rez-de-chaussée. Hier soir, c’était l’inauguration de ce lieu original et coloré ainsi que celle de la première exposition de trois artistes, LYS, Rétrofuturs et Philippe La Gautrière, dans ce lieu, jusque mi-juin.

 

Ce n’est qu’au début du mois de mai que l’Epatante Gallery est devenue une association. (Source : Rennes à coup de cœur) Juliette Pinto Maïa, la directrice de l’Epatante Gallery, et son équipe ont travaillé très rapidement, en trois semaines pour que tout soit prêt à temps. Les murs de cet ancien hôtel ont été repeints en bleu roi, en rose fushia et en vert. Le sol, un parquet clair, a été décoré d’étoiles, de nuages et d’un rond blanc avec une peinture délébile. La décoration, surprenante, originale et colorée, revisite cet hôtel anciennement appelé l’hôtel Saint-Gilles.

Quant au nom de la galerie l’Épatante, Juliette confie à Rennes à coup de cœur :  « Nous nous sommes concertés, nous avons pensé au 61 comme c’est l’adresse du lieu mais on s’est dit que cela faisait trop galerie concept. Puis, nous avons pensé à « épater la galerie » et c’est finalement devenu l’Épatante, car c’est là-dessus plus que sur la notion de galerie que nous voulions insister. Maintenant, il faut remplir notre mission qui est d’épater ! » Ce n’est peut-être pas le mot approprié, ce serait plutôt le verbe émerveiller qu’il faudrait utiliser. Mais l’Emerveillante, c’est moins accrocheur, on le convient.

Trois artistes : LYS, Rétrofuturs et Philippe La Gautrière 

Pour cette première exposition, il y a eu du monde. Le bouche à oreille a bien fonctionné ainsi que la communication autour de cette nouvelle galerie. Le public était relativement jeune, d’une vingtaine d’années, se tenant au courant régulièrement de l’activité culturelle rennaise. Les travaux des trois artistes avaient tout pour plaire à ce type de public, venu entre copains par curiosité. 

LYS, univers félin et onirique

Deux artistes sur trois étaient présents, Rétrofuturs et Philippe La Gautrière. LYS, elle, travaille actuellement à Berlin et n’a pas pu se rendre disponible. Lys Lydia Selimahigazi, née à Paris, est directrice artistique et illustratrice. Elle illustre notamment les programmes de la Machine du Moulin Rouge, depuis deux ans.

Les tableaux qu’elle expose dans la salle bleu turquoise, au fond, mettent en scène tous le même personnage. Ce sont des collages graphiques qu’elle réutilise constamment dans ses tableaux, une jeune femme au regard malicieux à l’apparence de fée ou de féline. Cette femme, c’est sûrement l’artiste elle-même, déformée et modifiée. Toujours la même femme brune aux cheveux longs. Mais elle n’utilise pas que son image pour ses supports graphiques. Elle utilise aussi des polaroïds et des photographies d’époque, entre autre.

Rétrofuturs attrape « l’air du temps au bon moment »

Rétrofuturs alias Stéphane Massa-Bidal, a beaucoup travaillé sur la langue et sa signification, la sémiotique. Lettres Modernes, sciences, information-communication, tel est le chemin emprunté par Rétrofuturs. Avec toutes ces connaissances acquises au fil des années, il se concentre désormais sur le langage. Il dépeint une ambiance actuelle à sa manière provocatrice et déroutante. Il présente trois travaux qu’il a réalisé il y a deux ans. La première est celle de « Sex Toys & Rock’n’Roll » dont font partis les tableaux « Porn To Be Alive » et « Following in love » (voir ci-contre). Clin d’oeil au réseau social, Twitter où les utilisateurs se « suivent » les uns entre les autres. 

Grosse écriture et fond à la couleur unie, les tableaux sont accrocheurs. Ils parlent de sexualité, de réseaux sociaux et de Rock’n’Roll. Pour travailler cela, Stéphane Massa-Bidal imbrique un code dans un autre, ce qui fait un mélange humoristique. En parlant de réseaux sociaux, Rétrofuturs a aussi mélangé l’ancien et l’actuel. A la façon des vieilles couvertures de journaux anglais, des gros titres de « magazines » arborent le nom Twitter, Facebook et Tumblr. Plusieurs réseaux sont déjà dépassés, fait remarquer Stéphane Massa-Bidal, comme LAST.FM, radio qui n’existe presque plus. Voilà le principe du « Rétrofuturs ». Le petit plus, ce sont les contrepétries illustrées par lui-même et réalisées avec un de ses amis. Ce genre littéraire est remis au goût du jour avec des illustrations pour le moins évocatrices qui aident les spectateurs à les deviner.

 

Prise de conscience collective avec La Gautrière

C’est dans la pièce à gauche de l’entrée, peinte en vert, que les tableaux de Philippe La Gautrière sont accrochés. Le plus grand se trouve à droite (voir ci-dessous). Dans le texte explicatif, l’artiste écrit qu’il a voulu revisiter le thème de « la biche dans les bois », utilisée maintes fois par les peintres. Mais à sa sauce, c’est-à-dire, peinte sur l’actualité et les préoccupations du vingt-et-unième siècle. La biche se retrouve oppressée. Un petit garçon, au premier plan. Des usines, au troisième. Un personnage à l’allure de cow-boy a un petit rictus satisfait. Tout ce mélange de genres forme un tout coloré et à l’apparence incohérente qui dénonce la dégradation de l’environnement.

« Si on me demande de dessiner un bouquet de fleurs, je ne peux pas m’empêcher de la faire avec des abeilles mortes par les insecticides tout autour », dit Philippe La Gautrière. En effet, ce dernier est un artiste engagé, sans vraiment le vouloir. En 2009, lorsque plusieurs catastrophes naturelles se sont succédées, il décide de faire plusieurs tableaux autour de ce thème. Trois oeuvres qui résultent de ce travail sont exposées à l’Epatante Gallery. Les autres parlent de l’érotisme par le biais de fruits et de courbes féminines. Ces oeuvres psychédéliques sont faites à partir de tampons qu’il scanne et colorie sur ordinateur. Il est de plus en plus amené à travailler à travers avec le numérique. Technique peu courante qu’il utilise depuis 1980, à la fin de ses études aux Beaux Arts, il crée volontairement des oeuvres enfantines très colorées car il trouve que le « langage enfantin est plus accessible » et que cela fait parti de « l’imaginaire collectif ».

 

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